Après « Je suis Charlie », l’heure est à la solidarité pro-syriens. Et c’est une excellente nouvelle. Seulement, je ne peux m’empêcher de vouloir saboter votre joie de vivre alors je vais y aller de mon petit commentaire.
Souvenez-vous, début septembre l’image d’un petit Syrien mort noyé défrayait la chronique sur FaceBook. La diffusion massive de la photo a donné pas mal de taff aux modérateurs de FB tant elle éventre ses conditions d’utilisation, mais ça ne l’a toutefois pas empêché de faire le tour de nos timelines entre une recette de risotto et le prochain Star Wars. Evidemment, de nombreux canards se sont empressés de diffuser l’image avant de revenir sur leurs articles pour expliquer pourquoi ils ont manqué de pudeur. La raison est simple : « pour ouvrir les consciences », et bien sûr pas du tout pour faire tourner les rotatives. Chacun avec sa conscience, hein les gars. 🙂
Quoi qu’il en soit, l’attitude de la presse n’est en rien étonnante. Pas plus que la nôtre qui – tous gorgés d’émotion que nous étions – a consisté à vouloir accueillir chacun une famille de syriens trempés dans notre deux pièces cuisine. Comme toujours, c’est une image choquante qui a provoqué ce si beau rassemblement spontané de citoyens concernés. Comme toujours, les dons dureront quelques semaines avant de disparaître. Comme toujours, ce sera mieux que rien. Pourtant, nous persistons à oublier les autres drames : tous sont aussi « loins des yeux, loins du coeur » que l’était Aylan avant la « prise de conscience ». Je vous pose donc la question : faut-il s’indigner uniquement lorsqu’on nous met la truffe dans le pipi ? Cet élan de générosité n’est il pas un peu tardif et hypocrite ?
Finalement, nous, citoyens embarqués par l’émotion, nous avons (et je ne nous félicite pas) encore réagi à l’instinct, sur le court terme. Pourtant, la question de l’immigration syrienne débattue en ce moment n’aurait même pas dû se poser : nous aurions pu envoyer quelques rafales en démonstration marketing qui auraient pu faire gratiner avec zèle quelques daeshiens. Nous aurions aussi pu libérer des territoires et prévenir l’exode des populations. Certes c’eut été au prix d’un soutien apporté à un dictateur, mais aussi et avant tout à des vivants que l’on a un poil tardé à regarder, à considérer et à sauver. Et, comble de l’hypocrisie, c’est maintenant, sous la pression populaire que notre gouvernement envoie nos petits avions. Peut-être aurait-il fallu commencer par là ? Bah…